La parole aux m�tiers

�ric Andrieu, DRH Merck France � Nous avons donn� aux �quipes RH et m�tier un acc�s plus large aux donn�es �

Éric Andrieu, DRH Merck France « Nous avons donné aux équipes RH et métier un accès plus large aux données »
�ric Andrieu, DRH France du groupe pharmaceutique allemand Merck : � Nous avons beaucoup d�velopp� la formation interne chez Merck et le digital a pris une place consid�rable. �

�ric Andrieu est le DRH France du groupe pharmaceutique allemand Merck. L'industriel, qui compte 4000 employ�s sur 11 sites en France, veut recruter 600 personnes sur le territoire en 2022. Dans cet entretien pour Enjeux RH et le Monde Informatique, �ric Andrieu �voque les moyens et m�thodes mis en oeuvre pour relever le d�fi. Au programme entre autres, recrutement sans CV et t�l�travail, appuy�s par des outils num�riques.

Publicit�EnjeuxRH : Vous �tes le DRH France de l'industriel pharmaceutique Merck. Pouvez-vous nous le pr�senter rapidement ?

�ric Andrieu : Merck est un groupe allemand de 352 ans avec trois secteurs d'activit�. Le � healthcare �, pour commencer, autrement dit l'industrie pharmaceutique, avec des m�dicaments de sp�cialit� en canc�rologie et neurologie et des traitements pour la fertilit�. Ensuite, les sciences de la vie, en forte croissance, avec du mat�riel pour l'industrie pharmaceutique, l'agroalimentaire, les laboratoires d'analyse, etc. Enfin, l'�lectronique avec des technologies de pigments, de cristaux liquides pour les semi-conducteurs, les �crans, etc. Le trait d'union entre les trois, c'est bien s�r la chimie. Nous sommes install�s en France depuis plus de 50 ans sur 11 sites aujourd'hui dont deux tiers pour la production. Et nous sommes organis�s de fa�on matricielle en fonction de nos trois activit�s et des zones g�ographiques. Nous avons plus de 4000 employ�s en France, 45% de femmes, avec une moyenne d'�ge de 37 ans. Et notre grand d�fi, c'est le recrutement de 600 personnes en 2022, soit 15% d'augmentation de nos effectifs.

En tant que DRH France, quel est votre p�rim�tre d'intervention et de qui d�pendez-vous ?

Je coordonne l'ensemble des activit�s RH pour tous les collaborateurs sur le territoire avec une vingtaine de personnes dans mon �quipe. Nous avons ce que nous appelons des HR VP et des market HR, responsables de l'accompagnement du business au quotidien. J'ai essay� de les regrouper par domaine d'activit�, et non par site. Enfin, j'ai aussi des experts en r�mun�ration, en � talent management � et bien s�r en recrutement. Sur un site industriel comme Molsheim (Bas-Rhin) avec 1900 employ�s, nous avons une �quipe de 5 RH. Les employ�s qui s'occupaient de l'administratif RH ou de la paye ne sont plus dans mes �quipes, mais dans un service � part - les business services - avec la comptabilit�, les achats, etc. Les �quipes RH se concentrent ainsi sur la strat�gie et l'accompagnement de la performance.

Je d�pends d'un manager en Allemagne. Et je vois mon r�le comme celui d'un ambassadeur de la France. Je cherche � expliquer avec p�dagogie le fonctionnement du pays, du droit du travail, des relations sociales et � d�mythifier la complexit� qui peut �tre per�ue au-del� de nos fronti�res. L'id�e c'est d'expliquer comment on peut mener un projet de r�organisation en France, qui est certes un processus social long d'information, de consultation, sans entraver les enjeux le business et de performance.

Cette organisation va-t-elle de pair avec la mise en place d'outils num�riques ?

Oui, le groupe a �norm�ment investi dans les outils informatiques depuis 7 � 8 ans d�j�. Nous avons donn� progressivement aux �quipes RH et m�tier, par exemple, un acc�s plus large aux donn�es. Avant, ils n'y avaient pas acc�s du tout. Aujourd'hui, un manager qui travaille depuis les �tats-Unis par exemple a ses �quipes en France, en Allemagne, en Chine. Il a donc acc�s � toutes les donn�es analytiques RH : la proportion de femmes dans son service, sa masse salariale, ses effectifs mois par mois, etc. De cette fa�on, il pilote ces indicateurs de performance RH au m�me titre que des indicateurs de performance business.

Publicit�Cela passe principalement par SAP et des d�veloppements internes. Nous avons ainsi un outil commun maison appel� HR4U auquel l'ensemble des managers et des �quipes RH se connectent. Il sert � la fixation des objectifs, � l'�valuation des performances, � la r�vision des salaires, au d�veloppement des collaborateurs, � l'organisation des successions, etc. Nous n'utilisons plus du tout les tableurs - Lotus, puis Excel - depuis longtemps d�j�.

Sur votre site industriel de Martillac en Gironde, par exemple, vous avez d�ploy� une organisation capable de mener � bien un lancement de produit, ce qui n'�tait pas le cas jusque-l�. Comment est-ce que cela se traduit d'un point de vue RH ?

Quand nous avons de grands projets, nous montons des �quipes mixtes RH et m�tier. Mais les RH doivent avoir un positionnement fort de business partner. C'est une des t�ches � laquelle je m'attelle et qui est d'ailleurs facilit�e par l'extraction des fonctions administratives de mes �quipes. Elles sont ainsi concentr�es sur l'accompagnement de la performance et sur la strat�gie. Nous sommes impliqu�s en amont des projets business. C'est une volont� des RH, mais aussi de l'entreprise et de ses dirigeants, m�me si chaque pays a ses propres probl�matiques. En France n�anmoins, je suis bien reconnu comme un partenaire strat�gique avec sa valeur ajout�e.

Vous recrutez donc 600 personnes cette ann�e. Quels types de profils sont concern�s, pour quelles activit�s ? Et faites-vous face � la p�nurie de certaines comp�tences ?

Nous avons effectivement 600 postes ouverts cette ann�e. Et nous continuerons qui plus est sur un rythme similaire jusqu'en 2024. C'est vraiment notre d�fi RH le plus important. Nous allons passer de 350 � 700 personnes par exemple � Martillac sur les biotechnologies et donc doubler en taille pour r�pondre � la forte croissance de cette activit�. Nous allons aussi recruter 400 personnes sur le site de production en sciences de la vie de Molsheim. Nous recherchons deux types de profils. Des op�rateurs de production en Alsace et des ing�nieurs de production et des ing�nieurs qualit� � Martillac.

Et effectivement, nous sommes confront�s � une p�nurie de candidats. En Alsace, c'est un peu particulier, car la r�gion est quasiment en plein emploi. Mais � Martillac, en revanche, nous faisons face � une forte concurrence sur le type de profils que nous recherchons.

Avez-vous travaill� sur des d�marches sp�cifiques pour contourner ces p�nuries de candidats ?

Les d�fis sont diff�rents sur les deux sites, mais effectivement, nous avons essay� d'innover. En Alsace, nous avons pass� un accord avec p�le emploi la r�gion pour mettre en oeuvre une m�thode de recrutement sans CV. Nos postes � pourvoir � Molsheim peuvent en effet convenir � des personnes sans formation ou form�es � d'autres m�tiers qui souhaiteraient se reconvertir. Et dans ce cas, ce ne sont ni le CV ni la formation de base qui constituent le crit�re num�ro un de s�lection.

Le processus du recrutement sans CV commence par des sessions d'information d'une centaine de personnes sur les besoins, les profils de poste, l'entreprise. Elles se d�roulent chez P�le Emploi, sont co-anim�es avec Merck. Ensuite, les candidats int�ress�s participent � une simulation de 3 heures dans nos locaux. Ils sont mis en situation r�elle sur un poste de travail, avec la charlotte sur la t�te, les classeurs de documentation, etc. Nous leur donnons un cas pratique non pas pour juger de leur niveau technique bien s�r, mais de leur pragmatisme, de leur dext�rit�, etc. Enfin, les quelque quinze personnes arriv�es jusque-l� passent un entretien avec les �quipes de recrutement pour �valuer leur motivation cette fois.

Ceux que nous d�cidons de garder entrent dans un dispositif de formation et d'int�gration de deux semaines, con�u avec la r�gion. Aujourd'hui, quasiment 100% des candidats arriv�s jusqu'au dernier entretien sont en poste. Nous avons d�marr� neuf promotions et embauch� 120 personnes depuis nos premiers recrutements sans CV fin 2021. De plus, m�me si ce n'est pas l'objectif de d�part, cette m�thode favorise la diversit�. C'est ouvert � tous les candidats sans crit�res de d�part. Nous avons par exemple embauch� une personne de 59 ans par ce biais.

Avez-vous �galement mis en place des outils num�riques pour le recrutement ?

Oui. Nous n'avons qu'une porte d'entr�e unique vers les recrutements, notre site Web. Les candidats postulent directement un poste en y d�posant tout simplement leur CV. Ce qui n'emp�che pas nos �quipes de recruteurs de travailler sur du sourcing de candidats par ailleurs. Mais notre d�marche la plus r�cente concerne la mise en relation directe des candidats avec des employ�s de Merck sur le site Web. Depuis avril, les postulants peuvent contacter en direct, par messagerie instantan�e, des salari�s qui connaissent le type de m�tier concern�. Les candidats posent ainsi toutes les questions qu'ils souhaitent. En ce moment, nous formons et informons nos employ�s � ce dispositif et nous avons d�j� 30 correspondants.

Comptez-vous mettre en place des outils li�s aux data de recrutement ?

Nous �tudions l'utilisation de robots pour r�pondre � certaines questions. Nos entretiens de recrutement se d�roulent � distance. Mais nous sommes une direction des ressources humaines et je reste attach� au mot humain. Il faut trouver un juste �quilibre. Je reste partisan de la dimension humaine, du contact. J'ai toujours pens�, m�me avant le digital que les processus sont des outils au service de la performance, au service d'une politique RH ou d'une politique d'entreprise. Mais ce ne sont pas les outils ou les processus qui font la politique.

Comment g�rez-vous la question du t�l�travail ? La pand�mie a-t-elle eu une incidence ?

Avec le Covid, nous avons acc�l�r� sur le sujet et nous avons n�goci� des accords tout au long de l'ann�e derni�re pour aller jusqu'� 3 jours par semaine. Cela s'adresse plut�t � nos ing�nieurs et ne concerne pas directement nos collaborateurs en production. Mais pour �viter les d�s�quilibres, nous leur avons quand m�me ouvert ces accords. Les employ�s de production b�n�ficient de jours avec une organisation assouplie pour se rendre � un rendez-vous m�dical par exemple.

Le t�l�travail est-il aussi un levier de recrutement ?

Oui, pour des fonctions � l'�tranger par exemple. Nous sommes amen�s � ouvrir des postes sans fronti�res. Le manager peut �tre install� en Chine, mais le candidat identifi� peut habiter en France ou aux �tats-Unis. Il n'existe ni fronti�re ni lieu de travail pr�d�termin� au moment du recrutement. C'est vraiment le profil qui fait le lieu g�ographique du poste. Le t�l�travail est une initiative du groupe dans le cadre d'un projet appel� � flexible working � d�ploy� progressivement � travers le monde l'an dernier dans quasiment tous les pays. Cela facilit� ce type d'embauches. Sur le m�me principe, le t�l�travail est d'ailleurs aussi un outil de gestion de carri�re.

Ce n'est plus du tout un tabou, une limite, une restriction. � l'exception, bien s�r, de postes tr�s techniques qui imposent de travailler dans un laboratoire particulier. Le t�l�travail et la flexibilit� du poste sont de vrais arguments de recrutement, mais nos l�gislations doivent suivre. Je parle du code du travail, de la s�curit� sociale, etc. Les l�gislateurs doivent se mobiliser pour que le collaborateur soit accompagn� aussi bien sur site que chez lui ou ailleurs.

Avez-vous mis en place des outils sp�cifiques pour le t�l�travail, en particulier depuis la pand�mie ?

L'�quipement est essentiel, et nous sommes bien plac�s pour le savoir. En 2020, un des premiers cas de COVID en Alsace �tait une employ�e de notre site de Molsheim. Nous avons d� �tre tr�s r�actifs. Nous avons �vacu� plusieurs centaines de collaborateurs quasiment en temps r�el. Et le lendemain, nous avons ferm� le b�timent. Heureusement, ils �taient d�j� �quip�s d'ordinateurs portables et de smartphones. De plus, nous connaissons bien les outils de collaboration comme Teams et nous avons tr�s vite organis� des r�unions � travers le monde. Nous nous sommes connect�s par �quipes de 10, 15, 20 voire 30 personnes. Nous pouvons nous organiser en sous-groupes. Je l'ai pratiqu� avec mes �quipes. Nous �tions tous en pl�ni�re, puis r�partis en ateliers entre lesquels je pouvais naviguer. Nous sommes une entreprise de science et de technologie dans laquelle les outils num�riques ne posent aucun probl�me.

Avez-vous des projets concernant la formation ?

Le collaborateur est d'abord l'acteur de sa propre carri�re. Mais l'entreprise doit lui donner acc�s � l'information sur les postes � pourvoir, sur la formation dont il aura besoin pour postuler. Nous avons donc beaucoup d�velopp� la formation interne chez Merck depuis pr�s de 8 ans et le digital a pris une place consid�rable. Et nous avons acc�l�r� depuis 4 � 5 ans environ. Nos employ�s peuvent s'autoformer avec des modules � distance avec des typologies et des longueurs de formation diff�rentes.

Certaines concernent l'�volution de carri�re et r�pondent plut�t � un besoin du collaborateur valid� avec son manager dans le cadre de l'entretien d'information et du plan de formation. Mais nous proposons aussi des formations au RGPD, � la conformit�, � la protection des donn�es, etc.

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